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6 critères pour choisir ses images

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Le choix du regard sur les images d’information, épisode 6/6   -   Revenir à l’épisode précédent 5/6

Comment choisir les images d’information que l’on regarde ? Nous imaginons une approche selon laquelle, dans chaque situation, le spectateur pourrait s’exercer à repérer si, en regardant une image d’information, il vit des opérations imageantes. Formulée en une seule phrase, à partir de ce que nous avons mis au jour précédemment, la question clé serait la suivante. “L’image regardée m’installe-t-elle dans une relation de sujet à sujet, ou bien plutôt de sujet à objet ?”

Afin de repérer dans quelle dynamique, ou dans quel mode de relation, les images entraînent le spectateur au moment où il les regarde, je propose 6 critères de discernement. Chacun repose sur l’observation de 6 variables caractérisant son expérience d’une image.

Diffraction de la lumière blanche en plusieurs rayons des couleurs du spectre lumineux

Cet article répond, souhaitons-le, aux commentaires intéressants déposés suite à la première proposition de 8 critères.

De la théorie de l’image à la pratique du regard

Concrètement, comment discerner la qualité de ses expériences d’images et le profit qu’on peut en tirer ? Il s’agit de pouvoir reconnaître la valeur qu’a pour soi-même l’action de continuer à regarder une image donnée. Si l’on prend un peu de distance par rapport aux différentes expériences vécues, cela revient à reconnaître la valeur habituelle que représentent, pour soi-même spectateur, les images émanant d’une même source (un site Internet, une chaîne, une émission récurrente). Quelle valeur revêt telle ou telle expérience d’image ? Contribue-t-elle beaucoup, peu ou pas du tout à ce que l’on veut vivre et devenir ? Pour le reconnaître, le spectateur doit nécessairement passer par une étape réflexive, même brève, pour prendre ensuite une décision en connaissance de cause.

Grosse boite à outils sur roulette

Mais où ai-je mis ma jauge à images ?

Comment exploiter dans une situation concrète ce qui a été évoqué dans l’épisode précédent sur le rôle vraisemblable de notre relation aux images dans l’existence et le devenir d’un être humain ? Comment le reconnaître dans nos expériences d’image, et ceci dans les conditions habituelles où nous les regardons ?

L’idéal serait un outil de discernement utilisable en toute situation. Ce serait une moulinette où l’on introduirait les images que l’on regarde et d’où sortirait une réponse, une note, un avis … Mais notre esprit n’est pas pourvu d’un logiciel-moulinette, bien heureusement pour notre relation aux images. Il est bon pour la vie des images et les surprises qu’elles nous réservent, qu’aucun tri systématique ne puisse être opéré sur les images. Ordinairement, le quidam, la plupart du temps autodidacte en matière d’image, fait généralement valoir son goût et son intuition, et accepte facilement que l’avis des autres soit différent. On échange les points de vue de manière informelle, spontanément, en sous-estimant à mon avis la possibilité d’une discussion argumentée où l’échange d’expériences fasse progresser le jugement de chacun.

Pour connaître son expérience d’une image

Sans forcément partager les mêmes réponses, les spectateurs pourraient se poser une série de mêmes questions pour jauger leur expérience. Il suffit qu’ils reconnaissent la pertinence de ces questions. Issues d’une réflexion sur l’image, je propose au jugement du lecteur six grandes questions, applicables à toute expérience d’image. Elles constituent six critères qui permettent de passer au crible son expérience de spectateur. Elles veulent aider à reconnaître la physionomie invisible de son expérience du moment.

Suffit-il de voir une image pour la connaître, comme mon fils de 7 ans le supposait, en s’étonnant de me voir réfléchir sur notre relation aux images ? Ces six questions font gagner du temps au spectateur qui veut acquérir une connaissance opérationnelle de son expérience d’une image. On peut parler d’une connaissance opérationnelle parce qu’elle permettra au spectateur qui l’entreprend dès le moment où il exerce son premier regard, ou bien juste après, de décider, entre autres, s’il interrompt son regard sur l’image.

Inspirée par la pensée de Mondzain, les six questions majeures portent sur six caractères propres à l’expérience d’une image. Comme l’outil doit être aisément praticable, il gagne à être simple et facile à mémoriser. C’est dans cette perspective que le nombre déjà élevé de six critères a été retenu.

Chaque critère reçoit un titre (par exemple, la confiance) et deux groupes d’affirmations. Le titre sert à reconnaître et mémoriser le critère. Le titre est un mot clef qui, pris seul, ne livre pas le mode d’emploi du critère en question ! Ainsi, connaître le sens associé à la confiance ne suffit pas pour comprendre le premier critère. Pour chaque critère, plusieurs formulations résument ce qu’est censé évaluer le critère. Ces formulations essaient d’embrasser la diversité des expériences possibles face aux images. D’autres pourraient s’y ajouter.

Chaque fois, les formulations se répartissent en deux groupes. Le premier groupe de formulations, face au drapeau vert, consiste au moins en une phrase écrite en gras. Si elle correspond à l’expérience vécue par le spectateur, elle est validée. Elle est le signe d’un caractère positif de l’expérience de l’image vécue par le spectateur. Une négation de la proposition par le spectateur indique son absence. L’autre groupe de formulations, face au drapeau orange, énonce la négation ou le contraire d’une dynamique impliquant des opérations imageantes. Une réponse positive à ce deuxième groupe de questions signale un caractère absent ou même négatif pour l’expérience observée.

6 criteres pour apprécier les images

Explication succincte du critère de la confiance

Prenons comme exemple le premier critère, celui de la confiance, particulièrement pertinent concernant les images d’information. A l’heure des puissants logiciels de travail sur l’image numérisée, on ne peut plus douter que les images ne peuvent prouver la véracité d’une information.  Ce qu’on voit sur une image photographique ou audiovisuelle n’a pas forcément été vu par des yeux. Ainsi, aucune image ne peut garantir son lien direct au réel. Elles peuvent encore moins affirmer une vérité puisqu’elles ne sont pas de nature verbale et n’énoncent aucune affirmation qui puisse être considérée vraie ou fausse. Si d’aventure on s’autorise à parler de vérité d’une image, ce qu’on entend par vérité est alors nécessairement assez éloigné de son sens courant. C’est pourquoi la richesse d’une image pour l’information ne dispense jamais de la confiance que le spectateur doit faire au journaliste qui l’informe, pour qu’il croie que l’information énoncée correspond à la réalité des faits. Or, l’image telle qu’elle est faite et la manière dont elle est présentée peut engendrer une action communicationnelle, comme par exemple celle de servir de preuve au propos qui l’accompagne. En quelque sorte, on peut dire que, dans certains cas, l’image contourne la nécessaire confiance qui relie celui qui montre à celui qui regarde une image.

La proposition vérifiant le respect de la nécessaire confiance entre les deux agents de la communication d’une image d’information est formulée ainsi.

­- L’image compte sur la confiance, assumant l’incapacité de l’image à prouver.

Il s’agit bien de vérifier que l’image n’est pas utilisée pour ce qu’elle ne peut pas faire, à savoir, prouver l’information. Une image qui oblige à faire confiance à celui qui montre, c’est un signe indiquant qu’elle œuvre dans le sens de ce qu’elle est et de ce qu’elle peut vraiment.

Au contraire, quand une image semble prouver ce que le présentateur ou le commentateur des images affirme, de telle sorte que j’ai moins besoin de lui faire confiance pour croire son propos, le spectateur peut en conclure qu’en cet instant, l’image compte – à tort – sur sa crédulité. Une validation de l’une de ces deux propositions confirmerait une invalisation de la première proposition.

‒ L’image regardée compte sur ma crédulité.
‒ Elle est présentée comme une preuve.

Mode d’emploi des 6 critères

Ce crible de six critères est un prototype. Il ne prétend pas à l’exhaustivité. A ce stade de la recherche, il a vocation à être pratiqué, éprouvé, critiqué et amélioré. Le mot critère convient-il ? Ma directrice de recherche me souffle par exemple paramètre. En effet, les questions proposées servent au spectateur à reconnaître la valeur que prennent les différents paramètres dans son expérience d’une image. Cela dit, je conserve pour l’instant le mot de « critère » parce qu’il explicite la visée discriminante et opérationnelle du questionnement.

Souvent, les critères s’impliquent les uns les autres, si bien que la présence de l’un suppose la présence de l’autre. Ces recoupements ne sont pas superflus. Disposer de plusieurs critères voisins permet de donner au spectateur autant de clés qui augmentent ses chances d’accéder à une évaluation aboutie de son expérience.

Les questions situées face au drapeau orange peuvent servir à confirmer les réponses aux questions situées face au drapeau vert, ou inversement. En effet, si le critère est validé positivement dans une expérience d’image, la description de son contraire devrait naturellement être impropre pour l’expérience observée. Un tel résultat confirmerait la netteté de la réponse trouvée pour un critère donné.

Si le premier type de formulation ne reçoit pas de réponse, le deuxième type de formulation décrit peut-être mieux son expérience. Deux types de formulation sont deux chances pour comprendre son expérience.

Au cas où il est vraiment difficile de répondre sur un critère donné, il reste cinq autres critères pour tenter d’évaluer l’orientation ou la dynamique de son expérience.

Pour, en quelque sorte, forcer le raisonnement à trancher en vue d’une décision pratique concernant le regard du spectateur, on se pose des questions fermées. On ne peut y répondre que par oui, non, voire « je ne sais pas ». Il n’est d’ailleurs ni toujours possible ni nécessaire d’être chaque fois tout à fait sûr de la réponse. Il est déjà significatif pour le spectateur de reconnaître une tendance positive ou négative sur plusieurs critères.

En effet, il n’est pas indispensable que toutes les questions obtiennent une réponse. Il n’est pas nécessaire qu’elles la reçoivent dans le même sens, avec seulement des drapeaux verts ou seulement des drapeaux orange. Il ne s’agit pas de chercher l’image idéale ou parfaite en éliminant toutes les autres. Il s’agit de disposer d’un horizon qui aide à départager les expériences selon leur valeur pour l’existence propre du spectateur. Admettons à ce stade qu’à la fin de la réflexion, plus il y a de réponses dans le même sens, plus la  valeur du regard d’une image s’affirme dans un sens ou dans l’autre pour le spectateur en situation. L’outil est au service de la décision.

Au terme de sa réflexion, minutieuse ou, avec l’expérience, très rapide, le spectateur a une connaissance de son expérience d’une image ou d’un ensemble d’images – en disant cela, je pense à un flux audiovisuel ou même à une ligne éditoriale. A partir de cette connaissance, il peut mieux choisir ce qu’il décide de regarder. Il a la possibilité de choisir une communication par l’image qui le respecte, voire qui le construit davantage sujet relationnel.

Ainsi s’achève cette série de 6 articles qui résument une première étape de mon travail sur le regard des images. Place à la pratique de ce discernement !

A venir

-        A quelles questions  suis-je conduit à ce stade ? (Vous vous les posez déjà ! Merci alors de bien noter cela dans les commentaires ci-après…).

-        Testons ensemble ces 6 critères sur une image audiovisuelle médiatique.

Revenir au début du feuilleton, 1/6 : Le choix du regard sur les images d’information.



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